Transmission à titre gratuit d’entreprise

Publié le 03 mai 2022

Auteur

Corinne Caraux

Mieux connaître le régime fiscal Dutreil pour en tirer profit

Longtemps, les transmissions d’entreprises familiales se sont réalisées sans dispositif spécifique applicable à ce bien très particulier que constitue l’entreprise.

Ceux qui s’adonnent à un peu d’archéologie fiscale savent que le législateur avait adopté en 1995 le premier dispositif d’exonération partielle applicable à la transmission à titre gratuit d’entreprise. Ce dispositif avait été censuré par le Conseil constitutionnel pour rupture d’égalité devant l’impôt, considérant l’avantage accordé aux bénéficiaires disproportionné par rapport aux contraintes exigées.

C’est en 1999 qu’un nouveau texte est adopté. Les faiseurs de ce texte, échaudés par la première tentative non-aboutie de 1995, veillent à un savant équilibre entre avantages et contraintes. Ainsi, un dispositif d’exonération de droits de succession à hauteur de 50 % de la valeur des titres est mis en place en cas de décès du dirigeant sous conditions notamment d’engagements de conservation, collectif puis individuel, des titres de longue durée : 16 ans au global. L’ancêtre du Dutreil était né !

Une fois ce socle posé, le législateur a procédé à de multiples modifications du dispositif, quatorze en 20 ans. Les premières furent majeures :


Les points clés du Pacte Dutreil

  • Un régime fiscal favorable qui s’applique en cas de donation ou de succession et quelle que soit la taille de l’entreprise

  • Une assiette fiscale fortement réduite : un abattement de 75 % sur la valeur des titres transmis

  • Une réduction des droits de donation de 50 % en cas de donation en pleine propriété des titres transmis avant les 70 ans du donateur

Les critiques qui visent à dénoncer ces multiples ajustements sont-elles fondées ?

Les conseils qui accompagnent les dirigeants d’entreprise sont conscients de la difficulté de confronter le droit aux multiples schémas économiques de transmission. Les ajustements législatifs successifs du régime Dutreil ont été motivés, soit dans un souci d’adapter le texte légal à la réalité des opérations de transmission, soit pour l’assouplir et augmenter ainsi la cible des entreprises susceptibles d’en bénéficier.

Le régime est certes devenu complexe, exigeant, mais n’oublions pas qu’un casse-tête permet un grand nombre de combinaisons.

2021 fut une année riche

Certaines définitions, notamment celles relatives à la notion d’activité éligible et prépondérante, de holding animatrice et des personnes éligibles pour le respect des conditions de direction, ont été rebattues. Les solutions retenues répondent favorablement à un certain nombre de préoccupations révélées dans le cadre de la consultation publique.

Au-delà des débats, aujourd’hui techniques, demain peut-être politiques, restons conscients de l’effort mené ces vingt dernières années pour faire vivre un régime de faveur qui permet en France la transmission à titre gratuit d’entreprise dans des conditions fiscales permettant, à ce moment clé, d’assurer la stabilité de l’actionnariat et la pérennité de l’entreprise.

Sans ce dispositif, la transmission à titre gratuit d’entreprise s’opérerait à des taux marginaux de 45 % en ligne directe et 60 % entre non-parents. Ce sont ces taux qui conduisaient à la vente de l’entreprise pour payer les droits de succession.

Sur un plan technique, il faut avoir conscience que l’exonération actuelle s’applique, lorsque toutes les conditions sont réunies, à l’ensemble des biens appartenant à la société éligible, soumis par définition au risque d’entreprise et non aux seuls « biens nécessaires », qualificatif qui avait en son temps été source d’insécurité fiscale en matière d’impôt sur la fortune.


C’est une véritable opportunité qu’il faut saisir : les enjeux en cause nécessitent anticipation, réflexion et sécurisation du dispositif. Votre conseiller peut faire appel à nos équipes d’ingénieurs patrimoniaux de votre région pour vous accompagner.


Sur la période 2015-2020, selon les données de la DGFIP(2) :

Le nombre de pactes Dutreil signés
est en forte hausse.

Plus de 2 000

signatures annuelles entre 2018 et 2020,
contre 700 entre 2008 et 2009.

L’essentiel des pactes Dutreil a été signé
dans le cadre de donations.

Plus de 90 %

d’entre eux entre 2018 et 2020 et donc
moins de 10 % dans le cadre de successions.

(1) Bulletin Officiel des Finances Publiques.
(2) Direction Générale des Finances Publiques.


Corinne Caraux, auteur de cet article, était en poste à la Direction de la législation fiscale lors de la rédaction des textes « Dutreil ».

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